Les Etats-Unis imposent de nouvelles sanctions au groupe Intellexa, derrière le logiciel espion Predator


Le département du Trésor américain a annoncé, mardi 5 mars, de nouvelles sanctions visant le groupe Intellexa, un vaste conglomérat d’entreprises du secteur de la surveillance, connu notamment pour le logiciel espion Predator. Des mesures qui font suite à une première salve de sanctions annoncées en juillet 2023 et ciblant un marché de la surveillance accusé de favoriser des violations des droits humains dans de nombreux pays.

Outre Intellexa, les sociétés Cytrox et Thalestris sont également ciblées. La première a développé le logiciel Predator, tandis que la seconde est identifiée par les autorités comme l’une des responsables de sa commercialisation. Toutes trois ont été ajoutées mardi à une liste de sanctions du département du Trésor. Cette dernière empêche toute transaction commerciale entre ces entreprises et des individus ou firmes américaines.

Dans le même temps, le sulfureux Tal Dilian, un Israélien passé par le Mossad et aujourd’hui à la tête du groupe Intellexa, a été, lui aussi, ciblé à titre personnel par les autorités américaines. Il a été placé sur cette même liste de sanctions, en même temps que sa compagne, Sara Hamou, dont le rôle important dans la complexe toile de sociétés reliées à Intellexa avait été révélé par l’enquête « Cyprus Confidential ». Le couple se voit interdit de mener toute transaction avec des entités américaines.

« La prolifération des logiciels espions commerciaux pose des risques croissants de sécurité pour les Etats-Unis et ces outils ont été détournés de leur usage par des acteurs étrangers pour violer les droits humains et cibler des dissidents dans le monde entier », souligne le département du Trésor dans un communiqué.

Des scandales d’espionnage

Predator, au même titre que le logiciel Pegasus développé par NSO Group, a fait l’objet de plusieurs enquêtes montrant que cet outil de surveillance, officiellement vendu aux polices et services de renseignement pour lutter contre le crime organisé ou le terrorisme, a vu son usage largement dévoyé.

En Grèce, par exemple, ce mouchard est au cœur d’un vaste scandale politique dans lequel les autorités sont soupçonnées d’avoir espionné aussi bien des journalistes que des membres de l’opposition. En octobre, Mediapart et le consortium European Investigative Collaborations (EIC) ont également révélé qu’un client de Predator au Vietnam avait tenté d’envoyer des liens vérolés en vue d’une infection par le logiciel espion à plusieurs cibles : on y trouvait des journalistes mais aussi un ambassadeur allemand, ou encore la présidente de Taïwan. L’enquête a également mis au jour le rôle joué par une entreprise française, Nexa Technologies, dans la vente de Predator à plusieurs clients, dont le Vietnam et Madagascar.

Intellexa et ses multiples sociétés avaient déjà fait l’objet d’une première vague de sanctions en juillet 2023 : elles avaient été placées sur l’Entity List (« liste des entités ») du bureau de l’industrie et de la sécurité (BIS), l’organisme de contrôle de certaines exportations et importations aux Etats-Unis. Un placement sur liste noire qui compliquait déjà leur activité. En février 2024, Washington avait de nouveau mis la pression en annonçant une modification de sa politique d’attribution de visas ciblant spécifiquement les personnes mêlées à des « abus liés aux logiciels espions commerciaux ».

Intellexa n’est pas le seul acteur dans le viseur des Etats-Unis puisque NSO, développeur et distributeur de Pegasus, a également fait l’objet de sanctions américaines, et ce alors que les autorités ne cessent d’élever de la voix contre le marché de la surveillance. A la fin de 2021, plusieurs enquêtes dans la presse avaient révélé que des employés de l’ambassade américaine en Ouganda avaient été ciblés par Pegasus.

Le Monde

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